Le mercredi après-midi, les parcs de la ville se remplissent peu à peu : le soleil prend ses aises et avec lui la chaleur et les fragments de peau nue.
Sur l’herbe fleurissent toutes sortes de rencontres.
A l’ombre d’un arbre presque centenaire, deux étudiants sont noyés dans les yeux l’un de l’autre. Juste à côté d’eux gisent leurs sacs de cours éventrés, vomissant des feuilles et des feuilles de mots compliqués. Mais l’heure n’est pas aux révisions et, main dans la main, ils vivent cet instant comme s’il était infini. Rien d’autre n’a d’importance et ils n’entendent même pas les deux enfants qui arrivent en criant.
Ils courent après leur ballon rouge aussi vite qu’ils peuvent en riant aux éclats. Ils ne sont pas encore très grands, alors ils lèvent les pieds de toutes leurs forces en essayant d’avancer encore plus rapidement. On dirait qu’ils veulent faire de la musique en piétinant le sol tant leurs minuscules pieds tapent l’herbe. Ils filent, mais pas aussi vite que la balle qui frôle le couple et termine sa course contre le tronc de l’arbre. Les deux petits s’immobilisent et observent les amoureux, craignant une réprimande. Mais les amants n’ont rien remarqué et continuent de se perdre dans cette passion qui les dévore tout entiers.
Le plus téméraire des enfants va récupérer le jouet à pas de loups, puis, jetant un dernier coup d’œil à ces deux personnes bien étranges, le lance à nouveau et faire redémarrer le jeu. Quelqu’un d’autre veut jouer, et alors qu’ils courent un tout petit chien arrive et fonce sur le ballon. Il est minuscule et saute vers eux, vers la balle, accélère, bondit et semble rire aux éclats. Soudain il tourne la tête et une voix crie : « Isis ! » Le cri n’est pas méchant, juste fatigué, sa maîtresse aimerait bien qu’il lui obéisse pour une fois. Alors le petit chien ravi de ce jeu reprend sa course de plus belle en abandonnant les petits et bondit à quelques mètres de la laisse qu’une main lui tend : c’est si amusant de jouer avec elle ! Mais la journée n’est pas terminée, alors il repart de plus belle, et en voulant regarder derrière lui, manque de s’écraser contre une jeune femme.
Celle-ci relève la tête mais déjà le petit chien est loin et sa maîtresse continue de l’appeler en lui courant après. Elle sourit puis retourne à son livre : qu’est-ce qui est pire, devoir courir après son chien pour qu’il obéisse ou sentir sur soi le regard amusé de tous ces gens assis sur l’herbe ? Mais à peine a-t-elle retrouvé sa concentration qu’une autre boule de poils débarque et lui fait la fête. C’est un chiot aux poils aussi fous que lui, et il saute sur son livre, ses genoux, essaie de lui lécher le visage comme pour lui dire qu’il est si heureux de la voir à nouveau ! Alors elle éclate de rire et range ses cours pour jouer avec le nouvel arrivant.
Toute gênée, une silhouette apparaît doucement : le maître veut gronder son chiot mais ne trouve pas la colère nécessaire pour y parvenir. Alors il contemple ce spectacle quelques instants et s’assoit juste à côté. La jeune femme réalise soudain qu’elle n’est plus seule, alors que le chiot continue de sauter autour d’elle et de mordiller ses mains.
Leurs regards se croisent et un même sourire timide naît au creux de leurs lèvres.
Le mercredi après-midi, dans les parcs de la ville, fleurissent toutes sortes de rencontres.